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Sagesse

Vers une étique spirituelle

     Au début du siècle dernier, en Occident, eut lieu la séparation de l’Église et de l’État, du social et du spirituel, de la physique et de la métaphysique, de l’humanisme et de la théologie, de la psychologie et de la transcendance, de la science et de la foi.

Chaque discipline est liée aux autres comme un collier de perles qui pare la Divinité. L’Absolu est en toute chose et entre chaque chose ; il en est le support comme le fil qui soutient chaque perle. Une fois assemblé, cela forme un très joli collier. Certes, il y a des différences, et tant mieux, c’est justement là sa beauté, mais n’oublions jamais son unité, car c’est la base de la vie, de la pensée, de l’espoir, de la méditation, de la prière, de l’amour.

Depuis des temps anciens, nous avons eu la trop fâcheuse habitude de juger telle ou telle discipline sur la seule expérience humaine. Malheureusement, celle-ci est limitée ; elle n’est pas absoute d’erreurs ni de supercheries. Suite à de malencontreuses expériences humaines dans les diverses tentatives sociales et spirituelles, nous avons « jeté le bébé avec l’eau du bain ». À l’exemple de la science et de la médecine occidentale, qui commencèrent à supprimer la religion de leur esprit. Le dogme des institutions religieuses, leur autoritarisme et leur pression psychique n’avaient plus leur place dans ce nouvel esprit scientifique, se disant objectif et libre. La société humaine y a gagné en jetant les formes extérieures de la religion (culpabilité, patriarchie, sentimentalisme ou fanatisme) mais y a perdu en éliminant ses aspects intérieurs (la joie de l’être profond, la paix intérieure, l’amour universel). Malgré leurs découvertes, les sciences ne soignent ou ne satisfont pas complètement, car la nature sacrée des êtres y est absente. La nature supra-humaine de l’homme, devenue prisonnière de l’ennui et de la stimulation du monde extérieur, et dépourvue de nourriture et de médecines sacrées, reste toujours insatisfaite.

Malgré l’abondance qu’essaie de prodiguer la société nouvelle, il n’y a jamais eu autant de carences physiques, psychologiques, morales et de malaise intérieur : la nourriture ne nourrit plus, la médecine ne guérit plus, la justice ne s’exerce plus, l’école n’éduque plus, les enfants n’écoutent plus, les amoureux n’aiment plus, la nature ne donne plus, les religions ne comblent plus et nous ajouterons tout spécialement que l’esprit français ne crée plus d’esprit car même s’il a des pensées, il ne peut les écrire nulle part, s’il a des idées inventives, il ne peut les réaliser en France, et s’il est artiste dans le vrai sens du terme, on ne lui donne ni pinceau ni instrument de musique. C’est de la contre-productivité à outrance ! Les scandales d’une liste qui ne peut être exhaustive ont été exposés dans de nombreux ouvrages pour attirer notre attention sur l’importance de nos choix.

« Les mœurs et les manières sont des usages que les lois n’ont point établis », nous rappelle Montesquieu, quand la Bhagavad-gita enseigne : « Nul ne peut devenir un spiritualiste ou quelqu’un d’accompli s’il mange trop ou trop peu, mais également s’il dort trop ou trop peu. Qui garde la mesure dans l’alimentation et le sommeil, dans le travail et la détente, peut, par la pratique du yoga (science de la vie et de la santé), apaiser les souffrances et résoudre les carences de l’existence matérielle ».

L’homme est appelé à suivre une voie double : celle de l’action et de la contemplation. L’activité doit être un acte vital. La vie active sert à nous purifier de nos passions et gagner en sagesse. « La contemplation n’est sans danger que pour les parfaitement expérimentés » dit un père du désert. La vie contemplative consiste en l’élévation de la conscience vers le Divin. La vie de l’homme suit un mouvement naturel divisé en quatre étapes pour son développement psychique et spirituel : la période de célibat ou d’études sous la tutelle d’un maître pour acquérir la connaissance spirituelle et celle de nos devoirs futurs afin d’évoluer dans la société ; la vie familiale et sociale ; la retraite pour se décharger de ces obligations et de ses passions (l’âge de la sagesse) ; et le renoncement, la vie contemplative pleine de sérénité et de réalisations.

C’est en redécouvrant des vérités toutes simples, consignées dans les anciennes Écritures, que les sages et nos ancêtres ont expérimentées pendant des siècles et des siècles, que l’on retrouvera la clef du bonheur. La sagesse, la bonne conduite et le bon sens sont synonymes. Aussi ne doit-on pas l’oublier et laisser recouvrir ces vérités par les ambitieux projets que nous fait miroiter le progrès. Le résultat est pour l’instant une montagne de faux problèmes qui nous hantent à tout moment. Il est bon de reprendre notre juste place sur terre et d’appliquer les règles qui gouvernent notre bien-être d’où découle la joie de vivre.

Réapprendre les règles est devenu indispensable si nous voulons nous débarrasser d’une grande partie de nos problèmes. Nous sommes fiers de notre ère scientifique, alors que nos vies ne sont pas du tout scientifiques. Sommes-nous devenus trop savants, si bien que nous marchons le nez dans les étoiles sans regarder où nous mettons les pieds ? Nous avons perdu tout bon sens, cette compréhension naturelle de la vie, pour nous fourvoyer dans le royaume des succès illusoires.

Dans Le réenchantement du monde, Jean Staune porte une réflexion pertinente sur l’éthique : « Si notre civilisation a pu progresser, malgré toutes les horreurs de ce siècle, vers plus de liberté et vers plus de respect des Droits de l’homme, c’est parce que la civilisation véritable prolongeait encore sur nous son rayonnement condamné et nous sauvait malgré nous. Telle une étoile qui a déjà explosé, mais dont le rayonnement nous parvient encore pendant quelques années, les fondements de la vision préscientifique du monde (une vision religieuse, n.d.a.) inspiraient encore notre humanisme sans qu’il s’en aperçoive, et l’aidaient à stabiliser son éthique bancale. Mais les fondements disparus de l’éthique, le rayonnement de l’étoile ne peut manquer de s’éteindre inexorablement, nous laissant dans le noir face à nous-mêmes… Or, voici qu’existe désormais une nouvelle étoile dont la lumière n’est pas encore parvenue jusqu’à nous. Nous participons à une course dont l’enjeu est énorme : la diffusion de ces nouveaux concepts à travers la société doit être plus rapide que le rythme auquel nous détruisons notre environnement, notre tissu social, et les barrières éthiques nous séparent du “meilleur des mondes”. Il est urgent que le rayonnement d’une nouvelle éthique, solidement fondée, nous éclaire tous et nous éloigne de la voie de l’autodestruction. On ne peut voir une nouvelle étoile avant que les lois de la nature ne nous y autorisent, car on n’accélère pas la vitesse de la lumière. Toutefois, la vitesse de circulation des idées, elle, ne dépend que de nos efforts. »

Rabindranath Tagore éclaire notre raison : « Non, il n’est pas en ton pouvoir de faire éclore le bouton. Secoue-le, frappe-le, tu n’auras pas la puissance de l’ouvrir. Tes mains l’abîment, tu en déchires les pétales et les jettes dans la poussière, Mais aucune couleur n’apparaît, et aucun parfum. Ah ! Il ne t’appartient pas de le faire fleurir. Celui qui fait éclore la fleur travaille si simplement. Il y jette un regard, et la sève de vie coule dans ses veines. À son haleine, la fleur déploie ses ailes et se balance au gré du vent. Comme un désir du cœur, sa couleur éclate et son parfum trahit un doux secret. Celui qui fait éclore la fleur travaille si simplement ! »

L’important est de rompre avec un réseau d’habitudes dangereuses, de délivrer ce qui est le plus exigeant et le plus brimé en chacun de nous : le sens du meilleur, pour être meilleur mais pas nécessairement le meilleur. Faisant ressortir la force noble de l’individu, dégagée par lui des routines sociales, familiales, nationales, ce sens du meilleur ne doit pas subir un nouvel esclavage, connaître le joug d’un nouveau maître aussi injuste, aussi aveuglé : l’individu lui-même. Un des rares philosophes moraux qui se soient distingués, jouant un rôle considérable dans le renouveau du scepticisme à l‘aube des temps modernes, et précurseur de la laïcité, Montaigne nous avise, dans ses Essais, que l’homme doit réduire ses fautes ordinaires, telles la trahison et la déloyauté, qui valent bien à ses yeux le cannibalisme comme preuve de la barbarie humaine. À ces qualités vicieuses, il ajoute l’ambition, la jalousie, l’envie, la vengeance, la superstition et le désespoir qui rendent l’homme incapable d’organiser le monde et lui-même comme un tout rationnel. Bien que ces maux fassent partie de la vie humaine, il prône la foi, la confiance et la fidélité, et nous dit : « Sans elles, la société se défait petit à petit. Quant à ce qui nous aide à vivre : l’amour, l’amitié et la lecture. »

Au-delà des croyances et des dogmes, des aspects théologiques et ritualistes qui distinguent et séparent les traditions du monde, il y a des attitudes justes à avoir pour réussir notre vie, des préceptes qui aident à vivre et à avancer sur le chemin du bonheur, dans la recherche de la sagesse ou une quête de vérité, de lumière et d’amour. Une telle prospection fut l’idéal des anciens philosophes et continue à réunir les hommes et les femmes, croyants ou non, en quête d’un noble idéal de vie.

Nourrir le corps et l’esprit est une nécessité. Je m’efforce de faire connaître les révélations d’une encyclopédie sur l’art de vivre dans l’unité tout en respectant la différence, au-delà des limitations humaines, dans une éthique sans étiquette temporelle : la science des Védas. Certains disent qu’il est mieux d’enseigner les vertus que de condamner les vices, d’autres diront qu’il faut condamner les vices et les péchés, mais pas le pécheur. Bref, la morale n’est pas pour nous culpabiliser mais assurément pour nous rendre plus humains car nous naissons moralement développables, mais non développés. La morale relève du devoir !

La morale est une science qui enseigne à conduire sa vie, ses actions. Pourtant, nous conviendrons que, sans perspective métaphysique, nous tombons dans un système où le mobile positif de toute action est l’amour-propre. « La morale est au fond de toute métaphysique, enseignait le philosophe Emmanuel Mounier (Œuvres), aussi y a-t-il une intériorité de l’homme qui n’est pas fuite du réel ni complaisance de soi, mais travail simultané d’intégration de soi et d’interrogation du monde : le lieu d’une réalité morale féconde se situe dans le rapport intérieur et libre d’un homme à ses actes, loin des politiciens de la vie spirituelle (les pharisiens), et le lieu fécond d’une réalité morale se trouve là où se dessine une harmonie qui ne soit pas conformiste, une autonomie qui ne soit pas séparatiste, à la conjonction d’un mouvement d’extériorisation et d’un mouvement d’intériorisation reliés entre eux par un mouvement de transcendance continuelle du donné au sein de la personne. Puissance d’aimer, goût du service et rigueur spirituelle sont les trois composantes de la richesse de la conscience morale. » Et Kant dirait en ses termes : « Si nous ne comprenons la nécessité pratique inconditionnée de l’impératif moral, nous comprenons en revanche son incompréhensibilité. » Et au théologien et psychanalyste Eugène Drewermann d’ajouter : « Quiconque s’occupe de psychanalyse a tôt fait de comprendre que les directives morales ne peuvent résoudre les véritables questions de l’existence. Il verra même qu’on ne fera que ralentir et empêcher l’évolution psychologique en l’accablant d’un catalogue tout prêt de postulats, d’options et d’impératifs, non parce que ces objectifs moraux seraient en eux-mêmes déplacés, mais parce que, tant qu’ils ne s’imposent pas de l’intérieur dans un processus de développement psychologique, ils continuent à enfoncer le moi dans son tort ; parce que la loi tue, non parce qu’elle est fausse, mais tout simplement parce qu’elle n’est que la loi. » (Fonctionnaires de Dieu)

Quant aux vertus, elles nous rappellent ou nous informent de leur existence dans le but d’un bien-être, d’un mieux-être pour aller ainsi dans le sens du Meilleur. « Non pour déguiser nos vices (écrit La Rochefoucauld dans ses Maximes), mais pour un amour pur encore caché au fond de notre cœur et que nous ignorons nous-mêmes. » L’éthique, c’est l’esthétique intérieure, faite par amour.

L’éthique spirituelle est impérative pour le futur de l’humanité afin qu’elle avance en douceur vers un destin d’heureux augures. Bien que les continents se soient séparés, les hommes se rapprochent à nouveaux et semblent adhérer à une globalisation de leur individualité et de leurs réalisations. Ce que je propose dans cet ouvrage, pouvait paraître hier encore marginal, utopique, révolutionnaire ou irréaliste, mais si l’on constate l’évolution de la conscience humaine, demain nous verrons du yoga dans les écoles, de vrais menus bio voire végétariens dans les restaurants, la généralisation culturelle de l’idée des chakras et de méridiens d’énergie, de la relaxation et de la méditation en entreprise, une alimentation saine et bio sur tous les étalages, la reconnaissance de tous les êtres vivants comme des âmes sœurs (des entités transcendantes), la refondation des religions de l’humanité en une spiritualité globale où tout être humain aura une réalisation de soi, comprendra le principe de la réincarnation et celui de la justice universelle des semailles et des récoltes, etc. Certes, beaucoup de métamorphoses vont s’opérer dans les choix importants des sociétés séculaires et dans la foi religieuse. Tant que l’homme reste en quête du sens véritable de la vie, la marche du monde passera naturellement, tout comme elle a évolué de l’homo erectus à l’homo sapiens puis à l’homo economicus, à l’homo religiosus. Je m’avancerai à dire que tel est le ‘rêve de Dieu’ et le véritable progrès de l’espèce humaine. Reste à le réaliser certes, mais d’une façon ou d’une autre, la nature des êtres étant de toujours chercher cette chose qu’ils n’ont pas pleinement, à laquelle ils aspirent sans cesse et dont ils ont tout le potentiel pour l’obtenir, que l’on nomme l’Amour, je suis confiant quant à l’avenir de l’humanité même si celle-là doit traverser de nombreuses turbulences ! « L’Ethique sera son bateau, les grandes âmes les officiers et les Écrits les vents favorables. »

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